27 décembre 2011

"Pour le bonheur de Maryse" ou le curieux livre d'un "auteur maudit"

Sur ce blogue, j’ai eu l’occasion de parler à quelques reprises d’un auteur étonnant (et méconnu) : Marilyn Valojie (1925-1995), alias Marilyn Baker, Marco, Maïk Vegor et peut-être encore quelques d’autres (Cona Rankin ?). De son vrai nom Jack Coutela, l’ex-dirigeant de la Wicca International Witchcraft est mort dans des circonstances tragiques après avoir mené une existence singulière, laissant derrière lui une œuvre hétéroclite et difficile à circonscrire. S’y côtoient romans fantastiques et d’épouvante, polars, romans historiques, récits sentimentaux, écrits ésotériques, bandes dessinées, etc. Ces livres ont souvent été publiés par des éditeurs éphémères (Monnet, Odepi…) dans des collections tout aussi éphémères (Terrific, Magie/Sorcellerie…). S’il écrivait sans cesse, semble-t-il, Coutela ne connut jamais la fortune grâce à ses écrits. Pourtant, son style est aisément reconnaissable par certaines constantes, notamment une obsession pour les héroïnes dont le nom commence par la lettre M (Maïk, Mic, Marghrete, Marilyn, Maryse, Marie et ainsi de suite). 
 
À la lecture des cinq romans qui forment le cycle consacré au personnage de Maïk, il est permis de regretter que les romans d’angoisse de cet auteur n’aient pas connu un plus grand retentissement. Selon Bernard Joubert (Dictionnaire des livres et journaux interdits), la Commission de surveillance française demanda, sans l’obtenir, la triple interdiction de certains volumes de la série pour les motifs suivants : « recherche constante de l’horreur », « illustrations malsaines » et même (mon favori !) « récits de supplices atroces et compliqués » !
Je me demande ce que sont devenues les archives de cet auteur, archives qui contiennent probablement des manuscrits inédits (le cycle consacré au personnage de Maïk n’a pas été publié dans son intégralité, par exemple).
Les rééditions des œuvres de J. Coutela sont rares, comme on s’en doute. Toutefois, cette année, l’un des romans signés Marilyn Valojie a eu cet honneur, j'ai nommé :
La réédition est parue en mai dernier dans la collection « Le Cercle Poche », qui réunit des romans érotiques d’une grande variété. Cet étonnant récit n’est certes pas destiné au grand public, ne serait-ce que par son sujet : la clystérophilie, autrement dit : l’émoi érotique produit par les lavements !
On reconnaît ici la « patte » de l’auteur, habitué des narrations au « je ». C’est un conteur habile qui sait garder le lecteur en alerte grâce à un style à la fois simple et fluide. Malgré les paraphilies abordées, il parvient – à mon avis – à éviter de sombrer dans le scabreux. Évidemment, c’est une question de point de vue, et je n’ai aucune peine à imaginer les cris scandalisés que pourraient pousser certains lecteurs en découvrant cet ouvrage.
Le roman baigne dans une atmosphère joviale qui fait écho au titre. La narratrice, Maryse, recherche avant tout l’épanouissement en compagnie d’amis qui ne jugent pas ses singularités, et le roman se permet quelques réflexions au sujet du conformisme sans pour autant donner dans le didactisme ou la propagande. Une fois terminé, l’ouvrage laisse une impression d’hédonisme heureux, surtout qu’il emploie par moments un certain humour et qu’il pose un regard affectueux sur les différents personnages qui le peuplent, des personnages bienveillants et attentifs les uns envers les autres…  
Ci-dessous, une revue ésotérique dirigée par Miss Valojie :
À présent, ce qu’il faudrait rééditer, hormis les Maïk Vegor, c’est la longue saga consacrée au personnage de Marilyn (7 tomes), laquelle se concluait par un métissage de fantastique et d’érotisme : Marilyn et les filles. Un huitième volume (Marilyn en croisière) fut annoncé par l’éditeur (Polyéditions), mais ne parut jamais. Poussait-il plus loin l’exploration d’une « littérature sorcière » ?
Bonne année 2012 à tous.


30 octobre 2011

Le fier sabbat des chats-fantômes


Après le douteux Noël félin, voici le fameux "spécial Halloween", avec (bien malgré eux) nos trois fils griffus à l'honneur (promis, c'est le dernier de la série).
Mais surtout, n'oubliez pas que les chats noirs sont des sorcières déguisées !

 Ariane & Frédérick


28 septembre 2011

Dans les dédales du Dieu Maïs

Billet écrit en collaboration avec Ariane

Il y a quelque temps, nous avons quitté Trois-Rivières pour une brève expédition dans une région qui nous était jusqu'alors peu familière : Le Haut-Richelieu. Nous avions quatre buts : 1) trouver Venise à Venise-en-Québec ; 2) traverser des villages aux noms alléchants, mais véridiques (voir la carte plus bas), comme Saint-Paul-de-l'île aux noix, l'Abri-de-vent-de-Nord, Saint-Valentin, le Village-de-la-Belle-Élodie et le Pit-à-Grenon ; 3) nous perdre dans un labyrinthe de maïs géant et 4) payer notre tribut au dieu du kitsch en arpentant le marché aux puces de Carignan. Preuves visuelles dans ce billet.
Patriotes du 21e siècle, nous commençons par descendre le Richelieu (repose en paix !) sur la rive Est.
Presque parvenus à la frontière du Vermont, nous arrivons à Venise-en-Québec, petite ville sympathique de quelques milliers d'habitants (sur la photo ci-bas, "le Terrasse Beach Club", à l'abandon... à moins que...). Les temps semblent durs à Venise, les algues bleues étant plus nombreuses que les habitants ! Les plantes vertes, sans doute baptisées ainsi par un daltonien, sont partout, cherchant à s’agripper aux pieds des voyageurs insouciants... Un pas de plus...
L'ensemble avait, avouons-le, un charme post-apocalyptique ! Mais quittons les plantes mutantes et continuons de chercher Venise et ses vertes lagunes.
Peut-être dans cette zone interdite ?
Ou disséminées dans cet horizon lointain ?
Ou dans les feuilles de cet arbre déprimé ?
 Conclusion : difficile de capturer la Sérénissime. Essayons plutôt de sillonner nos villages aux noms étonnants. Qui nous révèlent des paysages agricoles... et des paysages agricoles...
 De vieilles fermes à l'air vilain défient les voyageurs...
  Et de sympathiques affiches... en apparence inoffensives.
Et notre village fantôme préféré (en fait, plutôt un village "mort", compte tenu qu'il n'en reste aucune trace) : le village-de-la-Belle-Élodie, maintenant incorporé à son voisin, Saint-Valentin, village cannibale. Tout de même, en hommage à la légendaire beauté d'Élodie, un restaurant, la Belle Héloise, a été construit. La compétition féminine est féroce...
 (vous aurez deviné, sauf bond spatiotemporel, que cette photo n'est pas de nous)

Prochaine étape : se perdre dans le labyrinthe de maïs géant Artic Gardens, une lubie d'Ariane, au prénom prédestiné.
Incapables de nous perdre (la prédestination, encore ?), nous apprenons néanmoins que des gens mettent des heures à sortir de l'endroit ! Certains finissent même par y habiter de manière définitive (ex.: un clown bizarre croisé en chemin).
 Heureusement, Frédérick est plus fiable que Thésée ! Confiants, nous photographions des épis, activité périlleuse entre toutes, et nous fouillons dans les herbes piquantes. Résultat : le nord ne nous échappe toujours pas. Nous gardons tout de même un agréable souvenir des méandres du labyrinthe.
 Retour par l'autre rive du Richelieu, près du Canal de Chambly, là où les routes n'ont pas d'issue.
 Pour aboutir à notre dernier objectif, en l'honneur du kitsch, le (très) grand marché aux Puces de Carignan.
Et tout ça, à moins de trois heures de Trois-Rivières !

Jamais plus nous ne verrons le maïs de la même manière
ni n'entendrons le nom de Venise sans songer aux algues carnassières

22 août 2011

Sade et le cinéma

Ce n’était pas un mince défi que de s’attaquer – sérieusement – aux liens entre Sade et le cinéma. D’emblée, Jacques Zimmer précise qu’il ne s’agira pas de traiter du « sadisme » au cinéma (ce que d’aucuns ont déjà fait, partiellement), mais des œuvres qui se réclament explicitement de Sade. Deux volets sont analysés dans cette étude : l’œuvre et la vie de Sade, telles qu’adaptées par les cinéastes.


Fait intéressant, Zimmer ne se borne pas aux représentations cinématographiques, puisqu’il fait sans cesse dialoguer des sources écrites (récits de Sade, mais aussi éléments biographiques de spécialistes tels que Gilbert Lély), aspects historiques (notamment sur la censure), citations d’écrivains comme Flaubert… L’ouvrage, par ces liens originaux, donne donc lieu à une lecture fort stimulante qui porte à réflexions, entre autres grâce au sens des nuances de Zimmer. Ce dernier se plaît à rectifier des idées reçues ou des simplifications.

Un cas de figure majeur est constitué par les films qui narrent la vie de Sade. Les approximations, affabulations, erreurs chronologiques sont relevées – pas toujours comme des faiblesses des œuvres, d’ailleurs, car les qualités d’un film ne relèvent pas forcément de son adéquation au réel. Les apparitions plus ou moins farfelues du Marquis dans certaines œuvres sont aussi prises en compte, par exemple dans le film fantastique de Tobe Hooper Night Terrors.

La section de l’ouvrage consacrée aux adaptations des œuvres de Sade est aussi fort éloquente : elle montre bien la difficulté, pour les cinéastes, de représenter Sade, représentation qui se heurte sans cesse à une foule de problèmes : censure, limites du représentable, transfert problématique de l’écrit à l’écran, difficulté de faire « rendre » le texte sadien par les comédiens, etc., un cas patent étant l’adaptation que fit Claude Pierson de Justine, adaptation très fidèle qui, malgré tout, fut reçue avec perplexité ou méfiance par les critiques. On se rend compte aussi, à la lecture de l’ouvrage, que les adaptations de Sade ne furent pas si nombreuses et qu’un grand nombre d’œuvres du Marquis n’ont pas fait l’objet d’une transposition à l’écran.

Deux figures se détachent, celles de deux cinéastes que le Vatican jugea jadis comme les réalisateurs les plus dangereux du 20e siècle : Bunuel et Jess Franco. Si le premier est bien connu, le second, un maître de la série B, l’est moins du grand public. Zimmer fait clairement ressortir l’appropriation obsédante de l’univers sadien par Franco à travers ses adaptations, mais aussi à travers ses scénarios originaux ; le réalisateur espagnol déclina, tout au long d’une filmographie considérable, autant de variations sadiennes qui se fondent et se confondent en une sorte de long-métrage sans fin.

Zimmer a rencontré, pour l’ouvrage, plusieurs personnalités qui lui ont accordé des entretiens inédits, notamment Jess Franco et Jean-François Rauger, directeur de programmation de la Cinémathèque française. La conclusion du livre, elle, offre un vibrant plaidoyer pour un imaginaire libre.

Le lecteur qui connaît bien Sade ne sera pas déçu, puisqu’une foule de petits détails plus ou moins connus enrichissent l’ouvrage et permettent d’en apprendre plus au sujet de l’écrivain célèbre.

On signalera également un grand nombre d’encadrés qui permettent de fureter à travers l’ouvrage et d’obtenir un supplément d’informations sur divers éléments : résumés de romans, extraits de critiques de journalistes, changements dans la classification des films au fil des années, etc. Ces aspects renforcent la densité de l’ouvrage en question. Relevons, pour terminer, une agréable iconographie, dont 16 pages en couleurs au milieu de l’ouvrage.


01 août 2011

Fantasia 2011

Depuis 15 ans déjà, le festival Fantasia permet aux cinéphiles de découvrir des films étonnants et souvent rares, dans un contexte festif ou vibrant, mais toujours sous le signe d’une passion réelle pour le cinéma « de genre ». J’ai eu l’occasion de rendre compte de cet événement à plusieurs reprises sur ce blogue, notamment ici. Je reviens tout juste de la dernière édition du festival avec la tête pleine d’images et de bons souvenirs.


Départ pour Montréal vendredi, le 29 juillet, avec la belle Ariane. Arrivé à 16 heures, je retrouve mon vieux complice Patrick, de même que l'ami Simon Laperrière (tous deux sont activement impliqués dans le festival – Simon vient d’ailleurs de faire paraître un article consacré à la « contre-cinéphilie » dans un intéressant livre québécois (une première) sur le giallo). Nous bavardons brièvement avec la compagne de Simon, mais aussi avec Gilles Esposito (Mad Movies) et Jean-François Rauger de la Cinémathèque française. Puis, bref souper en compagnie de Patrick avant la découverte de ce qui sera notre première projection du festival: Little Deaths.Comme c’est très souvent le cas pour les films à sketches, les trois segments sont de qualité inégale. Qui plus est, malgré une thématique commune (l’élément psychosexuel traité à la manière du thriller au sens large), les univers représentés sont très différents. Malgré un départ sadien intéressant (un couple pervers enlève une jeune sans-abri), le premier sketch se termine de manière convenue et caricaturale après un invraisemblable retournement de situation. On a presque l’impression de lire un épisode ordinaire de Tales from the Crypt, cette bande dessinée d’horreur moralisatrice publiée par EC Comics au courant des années 50.

La seconde histoire se situe dans une ambiance qui rappelle un peu celle des premiers films de Cronenberg, même si son mélange de puérilité et de commentaire social noir aboutit à un déséquilibre qui mine la crédibilité de l'ensemble.

La dernière section, enfin, s’attarde d’abord à dépeindre une relation sadomasochiste qui sert de « rampe de lancement » à une conclusion radicale. Encore une fois, cependant, une impression de petite morale est ressentie. Quoi de mieux pour poursuivre la soirée que de faire une autre découverte ? Nous avons hésité un moment entre Kalevet et la «Nuit excentrique», qui nous aurait entre autres permis de voir Il était une fois le diable, un très étrange film fantastique français signé Bernard Launois… Mais puisque j’avais déjà vu cet inclassable en VHS, j’ai opté pour Kalevet (alias Rabies), long-métrage israélien en version originale hébreu, rien de moins ! Le programme de Fantasia précisait que Kalevet était « estampillé ironiquement comme le premier slasher israélien », en spécifiant que la référence générique en question est plus ou moins trompeuse. Le texte de présentation du film cite les premiers Danny Boyle à titre comparatif, ce qui, à mon sens, donne une bonne idée de l’ambiance de chronique criminelle outrancière de Rabies. Mentionnons quand même que le facteur grand-guignolesque est ici multiplié de manière considérable.On se retrouve donc dans une forêt où sévit un tueur en série et où plusieurs personnages se perdent, se pourchassent, s’aident ou cherchent à s’entretuer. S’il est en apparence joué sérieusement (c'est-à-dire sans les techniques propres à la comédie au premier degré, en dépit du jeu volontairement forcé de certains comédiens), le film vise le registre de l’humour noir. À ce titre, il est permis de regretter qu’à force d'outrance, le résultat finisse par lasser. On cherchera ailleurs le sens des nuances. Toutes proportions gardées, Kalevet me faisait songer à ces oeuvres qui se veulent irrévérencieuses et décapantes, telles Cadavres, mais qui, au final, laissent une impression de bêtise et de démagogie, entre autres à cause de leur caractère unidimensionnel.

La journée du samedi nous réservera une palette plus variée, qui commence par Stake Land, film américain dont le sujet est rebattu : les vampires. Je dois admettre d’emblée ma grande lassitude face à ce thème exsangue (sans jeux de mots) dont la déclinaison envahissante suscite chez moi un sentiment d’épuisement. Néanmoins, puisque Stake Land est produit par le cinéaste/comédien Larry Fessenden (généralement un gage de qualité), j’ai souhaité lui donner une chance. Bonne initiative : c'est de toute évidence un « film du cœur », réalisé avec beaucoup de soin. Une ambiance de déliquescence automnale pèse sur les péripéties de personnages dont la personnalité contribue au succès de l'entreprise. Un adolescent, une jeune femme enceinte, une religieuse et un combattant d’expérience arpentent une terre dévastée, en proie aux vampires et à des groupes religieux extrémistes. La réalisation évite les effets faciles (à quelques scènes près) et distille une atmosphère mélancolique qui rend d’autant plus frappantes les scènes de violence, lorsqu'elles surviennent.Après avoir pris une pause au pub Irish Embassy, nous regagnons le Theatre Hall pour la projection de The FP. Je n’avais pas souhaité lire beaucoup de précisions au sujet de ce film dans le programme de Fantasia, afin de garder la surprise intacte. Je savais tout au plus que le film se voulait une sorte d’hommage au cinéma des années 80. On citait Escape From New York, The Warriors et Class of 1984, trois films dans lesquels on retrouve un climat apocalyptique et une atmosphère violente.En fait, The FP, c’est bien autre chose : cette comédie relate comment deux groupes rivaux s’affrontent grâce à un jeu vidéo style Wii. Le tout se veut branché et jeune (musique électronique, personnages caricaturaux, humour gras, etc.). Ça m’a semblé décérébré, pénible et très lourd, à la manière de junk-food nauséeux, pesant et sans valeur nutritive. Comparaison culinaire mise à part, je vois mal comment cette « chose » pourra s’inscrire dans la durée. Tous les personnages hyperactifs et stéréotypés ont un vocabulaire ordurier limité aux mêmes insultes interchangeables, et les incessantes compétitions de pantins sautillants ont très vite fait de susciter l’ennui. On se croirait dans une version trépanée de Scott Pilgrim. Après la projection, les réalisateurs ont brièvement répondu à quelques questions du public (qui portaient sur des éléments superficiels, est-ce une coïncidence ? « Où avez-vous trouvé vos bottes ? », par exemple, question formulée dans une grammaire rudimentaire : "The Boots ! The Boots !"). On a aussi appris quelque chose de significatif : le père des réalisateurs (Ron Trost) est impliqué dans le domaine du cinéma américain depuis plusieurs décennies, à titre de responsable des effets spéciaux. Cela explique probablement grâce à quels contacts le film a pu être produit.Après une telle déception, le film suivant ne pouvait qu’être mis en valeur. De nationalité italienne, Morituris est la première réalisation de Raffaele Picchio. La recette : ¼ de I Spit on Your Grave, ¼ de série B italienne dégénérescente, période 1985-1989 (Les Fantômes de Sadome et autres), ¼ de Templiers Aveugles et ¼ de fumetti per adulti (une citation du Bourreau écarlate est d'ailleurs significative quant aux influences de Morituris). Le résultat correspond certainement à ce que le réalisateur en a dit dans sa présentation : « A nasty film ». La première demi-heure donne dans l’horreur psychosexuelle avec un groupe de jeunes hommes mal intentionnés à l’égard de touristes féminines. Bientôt, on change de registre pour aboutir à quelque chose de plus fantaisiste et de moins dérangeant. Au résultat, un « Midnight Movie » divertissant qui se borne à divertir grâce à ses effets-chocs. Quelques belles idées sont présentes sans toutefois être approfondies, ce qui est typique d’une certaine approche « onirique » du genre, propre au cinéma des Lucio Fulci, Lamberto Bava, Umberto Lenzi et consorts, dans la seconde moitié des années 80. Je ne serais pas surpris qu’une suite soit donnée à ce long-métrage, pour peu qu’il rencontre un certain succès. Et s’il contribuait à relancer le cinéma d’horreur italien, malheureusement trop peu présent depuis plusieurs années ?Après un sommeil réparateur, nous sommes en forme le dimanche pour découvrir Tomie : Unlimited, neuvième (!) volet d’une série de films fantastiques japonais consacrés au personnage de Tomie, jeune fille maléfique. Heureusement pour le public, cet opus peut être vu indépendamment des épisodes précédents, même si en avoir vu quelques-uns (ou avoir lu les mangas consacrés au personnage) enrichit l'appréciation du film. Le sympathique réalisateur Noboru Iguchi a présenté son oeuvre avec beaucoup d’humour, en soulignant sa filiation avec l'étrange Hausu (1977), que j’ai eu la chance de regarder voilà quelques années. L’un comme l’autre développent allègrement l’onirique, le bizarre et le grotesque (adjectif utilisé par le réalisateur pendant sa présentation du film, par ailleurs). Tomie : Unlimited est très imaginatif et, s’il n’est pas effrayant, il étonne sans cesse par des images et des développements narratifs imprévisibles. À voir !Nous avons terminé notre périple montréalais par un documentaire américain, Last Days Here, consacré à la formation de hard rock Pentagram, née en 1971. Groupe-culte au parcours sinueux et anarchique, Pentagram n’enregistra son premier album qu’une quinzaine d’années plus tard ! La personnalité chaotique du chanteur Bobby Liebling n’en est pas la moindre raison, comme le documentaire nous permet de le découvrir. Dépendant affectif et faisant usage de multiples drogues, Liebling rappelle plusieurs « légendes brûlées » du rock, les Brian Wilson, Roky Erickson, Syd Barrett, Arthur Lee et autres. Si certains d’eux sont parvenus à s’en tirer, ce n’est pas forcément le cas de tout le monde, et lorsqu’on découvre qui est Liebling, au début de Last Days Here, on doit admettre que le pari est loin d’être gagné. Quel pari ? Celui d’un fan, Sean Pelletier, qui s'est donné pour mandat de gérer et de relancer sa carrière. Celle-ci stagne depuis un bon moment, entre autres à cause de spectacles catastrophiques pendant lesquels Liebling s’effondre sur scène au bout de quelques secondes, dans le meilleur des cas. Le documentaire demeure passionnant pour qui s’intéresse aux légendes obscures du rock ; il en ressort le portrait pathétique d’un dépendant affectif prêt à tous les excès pour attirer l’attention.Une belle façon pour nous de conclure en beauté notre passage au festival, une expérience conviviale et sympathique. Remerciements à Patrick, à Simon Laperrière, à Nicolas Archambault et à l’équipe de Fantasia.

21 juillet 2011

Voyage (insolite) dans le nord du Québec

Billet écrit en collaboration avec Ariane.

La semaine dernière, nous avons quitté la Maison au fond de l'impasse (Trois-Rivières) en direction du Saguenay-Lac-St-Jean (plutôt prisé par les touristes) et du Nord-du-Québec (beaucoup moins visité, sauf par les esprits des manitous). Le trajet comptait un peu moins de 2 000 kilomètres, répartis sur six autoroutes principales (la 40, la 381, la 169, la 167, la 113 et la 155 - nous avons prudemment évité d'emprunter L'Autoroute du massacre cette année). Aperçu de l'itinéraire :

Après un passage à Québec et à Baie Saint-Paul, où nous étions également allés l'an dernier, les montagnes de Charlevoix n'ayant rien perdu de leur charme ni les cours d'eau de leur éclat, nous empruntons l'autoroute vers le Saguenay. Il y a peu de villages en chemin sur la 381, qui se caractérise par son relief très montagneux, assez vertigineux merci. Après avoir longé le parc national des Grands Jardins, nous faisons une halte à Ferland-et-Boileau, village du Saguenay, entouré de hauts sommets, comme le montre cette image, prise à la halte :
Nous traversons ensuite La Baie et Chicoutimi, puis Jonquière, où nous ne pouvons résister à une balade près de la Rivière-aux-sables. Souvenir :
Puis, direction Desbiens, village réputé pour sa grotte appelée "Le Trou de la fée". Nous espérions y aller pour, peut-être, y découvrir un passage secret conduisant vers un autre monde peuplé d'étranges créatures. Malheureusement, la grotte en question étant fermée pour l'été, nous avons dû refouler nos envies de spéléologie et de cryptozoologie. Mais le site est intéressant, offrant une randonnée dans une coulée, des ponts suspendus, un pont spatiotemporel (voir plus bas) qui permet de voyager dans le futur (sans en dévoiler les secrets, cependant), des ruines hydroélectriques, des chauves-souris en volière...

Entrée du site :
Moment science-fictif :
Mais la journée (pluvieuse) s'achève et nous devons regagner Alma où se trouve notre motel, bien entendu choisi pour son nom plein de promesses :
Bilan : endroit sympathique, quoique bruyant, même pour un vendredi (la faute aux perroquets titulaires). Mais Alma offre des charmes à proximité, comme en témoigne cette image :

Tout comme le "Rétro Dog" de Sainte-Monique-de-Honfleur, où nous n'avons pas pu nous empêcher d'entrer, en cherchant en vain le "rétro" dans la décoration.
Passé Sainte-Monique, près de Péribonka, le Lac St-Jean offre plusieurs paysages campagnards, comme celui-ci :
Sans oublier, à Dolbeau-Misstassini, les vestiges d'un défunt cinéma, dont le nom n'était pas sans nous faire rêver... Quel fut le dernier film à y être projeté ? Le Météore de la nuit ? Meteor Man?
Arrivée ensuite à Sainte-Félicien, où nous avons choisi de faire escale. Plutôt que de visiter le zoo comme tout le monde, nous préférons flâner dans la ville, près de la marina et de la chute à Michel :
Avant de repartir le lendemain direction Nord, avec plus de 200 kilomètres en pleine forêt, dans un isolement singulier (seuls quelques cannibales se sont enfuis à notre approche, laissant derrière eux des ossements d'êtres indistincts, inidentifiables et certes très troublants pour l'observateur averti). Sur la route, peu de voitures et une unique halte, où nous avons capturé cette image :
Remarquez la végétation typiquement nordique... Finalement, arrivée à Chibougamau sous la pluie, dans un centre-ville tranquille :
Outre une promenade au parc Obalski, nous en profiterons, un peu honteusement, pour jouer une partie de... hum... mini-putt nordique ?

Devinez qui a gagné ?

Sur la route 113, en direction de l'Abitibi, que nous avons parcourue le lendemain, ne se trouvent presque pas de villes. Seules exceptions : Chapais, avec un peu plus de 2 000 habitants, Waswanipi, une réserve amérindienne, et deux hameaux peuplés (?) d'une vingtaine de personnes, Desmaraisville et Miquelon. Nous faisons d'abord un arrêt à Chapais, au parc commémoratif. D'énormes insectes kamikazes se jetaient sur nous. Tel le crocodile de la mort du film éponyme, "ils croquent tout ce qu'ils trouvent".
Avant d'aller au cimetière amérindien, très émouvant, avec ses croix de bois entourées de fleurs abondantes... En comparaison, le cimetière de Chapais semblait froid et terne... Mais les images ne pouvant rendre compte réellement de l'ambiance, il faut aller à Chapais pour comprendre ! Image :
Passé Chapais et une centaine de kilomètres quasi déserts, voici Desmaraisville, un des hameaux, avec son aspect un peu désuet.

Mais ce n'est rien en comparaison du second hameau, Miquelon, érigé lors de la construction du chemin de fer vers l'Abitibi. Le pont où circulait jadis le train :
Et son ancien restaurant, particulièrement délabré... Bon appétit !
Et que dire du motel en ruine, sur lequel le silence complet planait, légèrement inquiétant ? Le temps d'une halte sépulcrale, les routiers fous y trouvent un asile à la (dé)mesure de leur psyché tortueuse.
Mais trêve de propos gothiques, nous arrivons à Lebel-sur-Quévillon, ville au nord de l'Abitibi. Un aperçu caractéristique :
Avant de repartir pour Chibougamau, et ensuite Roberval, avec sa superbe marina :

Et son motel au charme évident :

Ce qui met un terme à notre périple, en espérant que ce voyage, en différé, vous ait plu !